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Ma démarche artistique

Lors d’une promenade en forêt québécoise, un arbre qui ne ressemblait à aucun de ses voisins m’a attirée. Son tronc contenait des excroissances que l’on nomme « broussins » ; celles-ci, nées d’un défaut de circulation de la sève, sont formées de millions de fibres enchevêtrées. Cette anarchie crée un facteur d’imprévisibilité constant, de sorte que l’industrie forestière rejette de tels arbres. En revanche, pour la sculptrice que je suis, ces troncs sur lesquels poussent des tumeurs suscitent un très fort désir de création et de réparation.

Endormie à l’intérieur de cette morphologie inusitée, une forme se dévoile, s’élabore patiemment et se laisse percevoir. Chaque œuvre suit un cheminement différent puisque c’est la cicatrice de l’arbre qui me guide. Ma production est donc intuitive, presque méditative. En suivant le mouvement du bois, un geste à la fois, je découvre l’immense force de ses distorsions. Et c’est à travers ces magnifiques anomalies que s’expriment ma sensibilité et ma vulnérabilité.

Une connexion avec la matière m’habite désormais. Je ressens les possibilités du bois et je perçois ses limites. Je redonne vie à la partie mal-aimée de l’arbre. Au-delà des apparences et de la perfection surgit un regard neuf

Cette façon d’aborder mon matériau relie mon geste à la matière. J’écoute la fibre désordonnée. Je l’enrichis d’autres matières. Je lui apporte une certaine forme de réconfort.

Les thèmes organiques, le rapport entre l’intérieur et l’extérieur, les formes simples, incurvées, abstraites et sensuelles composent l’esthétique féminine de mes œuvres. Les lignes courbes et souples m’aident à insuffler un déploiement élégant à mes sculptures ; une appropriation naturelle décontractée de l’espace qui les accueille.